Au fur et à mesure que ses institutions et ses logiques évoluent, notre époque montre plus encore combien le désir humain ne peut s’articuler sans la force et l’organisation pulsionnelle, qui peuvent aller jusqu’à le submerger. Moins masquée par les interdits et les croyances religieuses, la pulsion se manifeste toujours plus dans les symptômes qu’elle produit, dans la logique qu’elle répète, les destins multiples qu’elle connaît, qui sont autant de substituts aux excitations qu’elle crée. Boulimies, addictions, SM, exhibitions, et bien d’autres formes la mettent ouvertement en scène. L’expérience freudienne en a épelé la clinique, la source, l’objet, le but, a montré en quoi la pulsion relaie l’organique dans le psychisme sous la forme d’une poussée constante. Les pulsions sont nos mythes, disait Freud, et en effet elles poussent selon une grammaire alors qu’elles sont ancrées dans les orifices et organes du corps, elles manifestent l’appareillage des zones érogènes du corps par le langage. Qu’il s’agisse des pulsions dites de vie, dans leurs formes orales, anales, sexuelles et autres, de la pulsion de mort dont l’introduction est centenaire, chacune plonge au cœur de l’économie psychique tout en étant concernée par les sciences du vivant. Prolongeant cet abord, Lacan montre en outre que les logiques du désir à leur tour s’appuient sur ces objets du corps, leur empruntent aussi certaines particularités physiologiques. L’objet pulsionnel se complète des objets a, comme opérateurs logiques entre le sujet et l’Autre. Ce numéro mettra au travail l'actualité de ce concept nécessaire.